Introduction à la période des quatre semaines

Introduction à la période des quatre semaines

עַזָּה כַמָּוֶת אַהֲבָה קָשָׁה כִשְׁאוֹל קִנְאָה רְשָׁפֶיהָ רִשְׁפֵּי אֵשׁ שַׁלְהֶבֶתְיָה

Fugace comme la mort est l’amour, coriace comme l’abime est la jalousie. Ses traits sont les traits du feu, celui de la flamme de D.ieu.

Chir Hachirim 8:6

Sfat Emet :

  • « Fugace comme la mort est l’amour » c’est le Chabbat Chékalim.
  • « Coriace comme les abimes est la jalousie » c’est le Chabbat Za’hor.
  • « Ses traits sont les traits du feu » c’est le Chabbat Para.
  • « Celui de la flamme de D.ieu » c’est le Chabbat Ha’Hodech.

Ce verset retrace fidèlement l’orientation de la période des quatre semaines.

Ces semaines ont été distinguées par le prophète Ezra. C’est en effet à la période où il instaura la lecture hebdomadaire des passages de la Thora, et institua aussi celle de ces quatre passages. Certains avis de la Guémara témoignent que les Chabbatot où la lecture de ces passages exceptionnels était faite, la lecture hebdomadaire était suspendue. Cet avis n’est cependant pas retenu. C’est en effet après la lecture de la séquence hebdomadaire que nous rajoutons ces passages.

Il est important de préciser que le Chabbat Haguadol qui précède Pessah ne fait pas partie de cette liste des quatre Chabbat. En effet l’institution de ce Chabbat Haguadol diffère totalement de celle des quatre Chabbat. Ces derniers se distinguent par une lecture d’un passage de la Thora, ce qui n’est pas le cas du Chabbat Haguadol. De plus l’institution de ce Chabbat date de quelques neuf ou dix siècles. Alors que celle des quatre Chabbat datent de plus de deux mille cinq cents ans, à la période d’Ezra le prophète.

L’explication classique du sens de ces quatre Chabbat est :

Pour le Chabbat Chékalim : Rappeler aux hommes leur devoir de s’associer aux frais du Beth Hamikdach en donnant une pièce d’un demi-Shekel. Aujourd’hui ce devoir n’est plus qu’un souvenir.

Pour le Chabbat Za’hor : Se rappeler, à l’approche de pourim, des méfaits d’Amalek contre le peuple juif. 

Pour le Chabbat Para : Rappeler aux hommes de se purifier à l’approche de Pessah.

Pour le Chabbat Ha’Hodech : Rappeler au peuple juif que la fête de Pessah’ approche et qu’il faut donc se munir d’un agneau pour le sacrifice pascal.

Cependant la raison de l’institution de ces Chabbat semble révéler un sens plus profond. Car, hormis ces quatre Chabbat, nous ne trouvons aucun rappel de ce genre dans tout le calendrier. Or, pour les mêmes raisons que celles citées précédemment, il aurait été logique que les ‘Hakhamim fassent un rappel aux autres fêtes de l’année.

Seuls ces quatre rappels sont différenciés des autres. Pourquoi ?

Les quatre semaines

L’auteur du Sfat Emet nous révèle que ces quatre semaines ont été choisies pour nous conduire prudemment mais surement vers la fête de Pessah’. Non ! dit-il, non pas vers Pessah’ mais plutôt vers le mois de Nissan.

En effet ces quatre Chabbat sont célébrés durant le mois d’Adar (qui précède Nissan) ou légèrement décalés (ce qui dépend de la corrélation du jour de la semaine avec la date).

Or ce mois de Nissan est le premier d’un certain calendrier : celui du peuple.

En effet, si le 1er Tichri est le jour du nouvel-an, il ne l’est que pour le juif à l’état individuel. Seul face à D.ieu, il se présente le jour de Roch Hachana. Mais ce même juif doit savoir reconnaitre un second aspect de sa nature : il est chaînon d’un peuple, d’une nation. Il doit agir, en fonction de sa personne certes, mais aussi dépendant de la société dans laquelle il vit. Il est particule d’une entité qui le dépasse. Ce deuxième aspect est représenté par un nouveau calendrier qui débute le 1er Nissan.

Ainsi, dit le Sfat Emet, cette période des quatre Chabbatot amène le juif à se préparer à la venue de cette nouvelle année. Elle le dirige et lui apprend quelles doivent être ses résolutions afin de bien entamer cette période.

Tout comme le Roch Hachana de Tichri est introduit par un long mois de Séli’hoth, dans lequel l’homme se remet à son Créateur et implore Son pardon. Ainsi ces quatre semaines dévoilent à l’homme quel doit être son comportement au sein de la société, quel est le programme et le processus qui lui permettra de parfaire sa relation avec ses semblables.

Revenons à présent aux correspondances que nous faisait le Sfat Emet :

  •  « Fugace comme la mort est l’amour » c’est le Chabbat Chékalim.
  • « Coriace comme les abîmes est la jalousie » c’est le Chabbat Za’hor.
  • « Ses traits sont les traits du feu » c’est le Chabbat Para.
  • « Celui de la flamme de D.ieu » c’est le Chabbat HaH’odech.

Nous nous proposons d’expliquer de manière concise l’orientation de ces quatre Chabbat telle que le Sfat Emet nous l’indique.

Le premier de ces quatre Chabbat s’appelle Chabbat Chékalim, car il rappelle aux juifs le devoir de s’associer financièrement à l’entretien du Beth Hamikdach. Devoir sacré ! Nous posons d’emblée que l’intérêt est particulièrement dirigé vers la capacité de chaque juif à s’unir avec l’Autre et à partager son soi-même. L’union du peuple étant le message clef de ce Chabbat particulier.

Chabbat Shékalim est suivi d’un second Chabbat : Chabbat Za’hor. Ce dernier souligne l’importance de se rappeler des ennemis d’Israël et des menaces qui en dépendent. Car s’il est important de souder le peuple, il est tout aussi fondamental d’identifier et d’éloigner toute menace qui puisse entrainer son éclatement. Car créer une entité mais ne pas se soucier du maintien de l’association de ses composants rend inévitablement tout le projet caduc.

Vient ensuite le Chabbat Para, et le Chabbat Ha’Hodesh. Ces deux Chabbatot incitent le peuple à s’associer face à un projet commun. Car l’association d’un groupe n’est garantie qu’à travers l’entreprise d’un programme commun. Ce qui peut souder réellement une communauté d’individu est nécessairement un projet commun, une réalisation collective. En effet, lorsque chaque membre s’investit pour l’élaboration d’un projet collectif, c’est justement cet investissement qui lui garantira de rester fidèle à ce groupe.

Or ce projet commun qu’a tout membre du peuple juif n’est autre que le devoir de faire rayonner le nom de D.ieu dans le monde (Kidouch Hachem), à travers un comportement droit et exemplaire.

Cependant la construction de ce projet se fait en deux parties :

Tout d’abord, l’annulation de tout objectif annexe. Ce n’est qu’à travers un investissement total et absolu que ce projet grandiose pourra aboutir. Voici le sens du Chabbat Para qui est là pour souligner l’importance de se séparer des impuretés provoquées directement ou indirectement par tout intérêt étranger et nocif à la Avodat Hachem.

Après s’être distancé des activités importunes et futiles, c’est alors que l’on pourra élaborer les prémisses d’un projet commun, celui de la Avodath Hachem. Ce projet est rappelé à travers le Chabbat Ha’Hodech.

Voici en bref, le processus qu’Ezra le prophète présente, afin d’établir, à l’approche du mois de Nissan, une relation plus vraie et plus profonde avec le peuple juif dans lequel nous vivons.

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Comments (1)

  • Emmanuel

    Tres sympathique et belle approche de cette période.
    Je n’avais jamais entendu cette façon de voir nissan comme le roch hachana du juif dans sa collectivité (je l’avais plutôt entendu sur le deuxième jour de roch hachana…) j’aimerais bien savoir d’où le Sefat Emet a sorti cette interprétation, si il y’a une quelconque source…
    De plus vous n’avez paz bien expliqué pourquoi le chabbat hahodech rappelle spécialement la ‘avodat Hachem, est-ce parce que c’est la première mitsva reçue par le peuple juif? Si l’essentiel est de faire transparaître le kidouch Hachem comme vous l’avez dit j’aurais choisi une autre mitsva si il m’en était donné le choix…la mitsva de roch hodech a plutôt un autre sens profond qu’Hachem a donné le pouvoir de fixer les fêtes entre les mains de notre peuple (lakhem)…
    Et je ne vois pas en quoi la mitsva de Para permet directement la ‘avodat Hachem soulignée par la mitsva de roch Hodech, il est en effet permis de fixer les mois même en étant impur…peut-être voulez vous définir la paracha de ha’hodech sur sa suite qui est la mitsva du korban pessa’h qui ne peut être fait en étant impur comme le disent les commentateurs, néanmoins dans ce cas pourquoi a-t’on appelé ce chabbat ha’hodech et non chabbat korban (a-t’on appelé le précédent chabbat ‘houkat hatorah juste du fait du début de la phrase?)
    Enfin il serait bien d’avoir un éclaircissement sur le lien entre les mots du passouk et les chabbatot…il est en effet facile de comprendre le lien entre chekalim et l’amour et peut-être aussi entre zakhor de ‘amalek et la jalousie, mais je ne vois pas de logique à un lien entre Para et des traits de feu ou ha’hodech et la flamme d’Hachem.
    Merci et ‘hazak

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