Parachat Nasso – La centralité du Cohen dans tous les aspects de la vie

Parachat Nasso – La centralité du Cohen dans tous les aspects de la vie

La paracha de Nasso s’ouvre sur la suite des sujets abordés dans la paracha précédente, à savoir les dénombrements, les recensements et les listes. Cependant, juste après, nous trouvons une série de lois qui semblent à première vue sans rapport les unes avec les autres.

Au début, la Torah commande d’éloigner les impurs des camps de la Chekhina, de Lévi et d’Israël. Ensuite, la Torah détaille les lois relatives à celui qui dérobe et se parjure, qui devra s’acquitter d’une amende et d’un cinquième supplémentaire. Juste après cette section, nous trouvons celle de la Sotah qui parle d’une femme mariée qui s’est retrouvée seule avec un homme après que son mari l’ait mise en garde. La Torah lui ordonne alors de se rendre au Sanctuaire et de boire les « eaux amères » pour prouver sa pureté. La section suivante comprend l’interdiction de boire du vin, de se couper les cheveux et de se rendre impur près d’un mort pour celui qui s’est engagé à être Nazir. Le dernier sujet est la Birkat Cohanim, bénédiction que les prêtres ont reçu l’ordre de prononcer sur Israël chaque jour.

Il nous faut comprendre le lien entre ces sujets qui, en apparence, n’ont aucun rapport.

En vérité, Rachi établit un lien entre ces sujets à plusieurs endroits. Par exemple, il explique la juxtaposition entre la section sur le parjure et celle sur la Sotah en disant : « Si tu retiens les parts des Cohanim, tu devras venir les voir pour leur amener la Sotah » (Rachi 5:12). De même, ses paroles bien connues au nom du Talmud (Sotah 2a) : « Pourquoi la section du Nazir est-elle juxtaposée à celle de la Sotah ? Pour t’enseigner que quiconque voit une Sotah dans sa dégradation doit s’abstenir de vin, car cela mène à l’adultère » (Rachi 6:2).

Mais au-delà de ces explications de nature exégétique, je voudrais trouver un fil conducteur commun à tous les sujets de la paracha.

Il semble que le thème qui se dégage de l’enchaînement des sections de lois dans notre paracha est la place centrale du Cohen dans nos vies. L’intention de la Torah dans ces commandements est de ne pas nous faire penser que le Prêtre se cantonne uniquement dans le Sanctuaire, et que son seul rôle est le service divin et les affaires spirituelles, comme s’il était distinct et séparé de la vie du peuple par nature.

Les trois sujets principaux, à savoir le vol avec parjure, la Sotah et le Nazir, viennent souligner l’omniprésence du Cohen dans tous les domaines de la vie humaine, que ce soit dans les relations avec autrui et en particulier dans les affaires d’argent, dans la vie conjugale, ou dans la relation de l’homme avec lui-même.

La section sur le vol avec parjure concerne principalement le vol fait à un converti sans héritiers, dont la part revient aux Cohanim, comme l’explique Rachi. C’est pourquoi cette section se termine sur les parts des Cohanim. Cela vient en réalité placer le sacré dans la conscience de l’homme, y compris dans ses relations matérielles avec son prochain, de telle sorte que s’il n’y a personne à qui payer, c’est le Cohen qui recevra l’argent.

De même, dans les affaires conjugales, lorsque l’épouse s’est retrouvée seule avec un autre homme, le lieu où la pureté sera établie est le Sanctuaire, où le Cohen lui fera boire les eaux amères.

Également pour le Nazir qui souhaite se sanctifier et s’éloigner du matériel, à la fin de son vœu d’abstinence, il devra se rendre auprès du Cohen et offrir un sacrifice.

Notre paracha vient nous enseigner que bien que le Cohen soit physiquement séparé du peuple et que sa présence principale soit au Sanctuaire, le but est qu’à partir de là il puisse influer au-delà, et que l’aspect sacré du Sanctuaire soit ressenti dans toute la vie du peuple. L’homme intériorisera alors que la vie matérielle et la vie spirituelle ne sont pas deux mondes parallèles, mais qu’ils sont liés l’un à l’autre, et que la Présence divine est présente de manière très intime même dans la vie courante.

Il semble que ce soit le sens de l’introduction de la section sur l’éloignement des impurs des camps. Il y a en effet trois camps correspondant à trois niveaux de sainteté : le camp de la Chekhina où se trouve le sanctuaire, celui des Lévites et celui d’Israël. Certes, le camp de la Chekhina est le plus saint, c’est pourquoi l’impur par contact avec un mort y est interdit. Mais le camp d’Israël est aussi saint, et c’est pour cette raison que le lépreux y est interdit. D’où provient la sainteté du camp d’Israël ? La réponse est : du camp de la Chekhina ! C’est précisément parce que ce dernier est si saint qu’il peut ensuite influer pour que tous les camps soient saints.

Il n’est donc pas étonnant que le sujet qui clôture ces sections soit la Bénédiction des Cohanim, qui est en fait un commandement visant à établir un lien explicite et réciproque entre les Prêtres et Israël.

Pour conclure, on pourrait peut-être proposer que les trois bénédictions de Birkat Cohanim correspondent aux trois sections mentionnées : « Qu’Il te garde » – Rachi explique que cela fait référence à la protection des biens matériels, correspondant à la section sur le vol. « Et qu’Il te fasse grâce » – l’intention est que l’homme et sa femme trouvent mutuellement grâce, ce qui est le gage d’une paix conjugale, comme il est dit : « Si elle ne trouve pas grâce à ses yeux parce qu’il a découvert une chose indécente en elle, qu’il lui écrive une lettre de divorce » (Devarim 24:1), correspondant à la section sur la Sotah. « Et qu’Il te donne la paix » – cela peut signifier que l’homme aura une paix et une sérénité intérieures, correspondant à la section sur le Nazir.

About The Author

Ancien élève de la yechivat Hevron Guivat Mordehai. Auteur de plusieurs livres sur le Talmud et la Halacha. Roch Kollel Michné-Torah à Jerusalem.