Souccot – Sim’hat Beit Hachoéva

Souccot – Sim’hat Beit Hachoéva

C’est une mitsva de se réjouir durant la fête de Souccot. Ainsi le Rambam écrit (hil’hot soucca et loulav chap8) « Bien que nous ayons la mitsva de nous réjouir à l’occasion de chaque fête, à l’occasion de la fête de Souccot, existait une joie supplémentaire, comme il est dit dans Vaykra (23 ;40) : « ושמחתם לפני ד’ אלקיכם שבעת ימים – vous vous réjouirez devant Hachem votre D ; ieu durant sept jours »… Comment se déroulaient ses réjouissances ? Les flutes, harpes, violons et autres instruments faisaient vibrer les sons des mélodies… les danses effrénées, les tourbillons et autres manifestations d’adresse ainsi que d’époustouflantes présentations faisaient forte impression – chacun selon son savoir-faire.

Ces démonstrations au Beith Hamikdach donnaient lieu à des joies exceptionnelles, uniques en leur genre au point que nos Sages dans la guémara Soucca (51a) disent : « מי שלא ראה שמחה בית השואבה – לא ראה שמחה מימיו  celui qui n’a pas assisté à simhat Beith Hachoeva n’a jamais vu de véritable simha de sa vie ».

מדוע עורכים "שמחת בית השואבה" בחג הסוכות? - אחינו

Cette simha était d’une telle dimension que c’était pour tout celui qui y assistait une occasion de grandir. Rabi Hocha’ya demande la raison du nom donné à cette manisfestation de joie. Pourquoi ce nom de Beith Hachoéva ? Car on pouvait y puiser le Rouah Hakodech (Béréchit raba 70 ;8).

Nos Sages nous apprennent également que le Navi, Yona ben Amitaï faisait partie des pèlerins qui montaient à Yérouchalayim. Lorsqu’il participa aux festivités de simhat beith hachoéva, le Rouah Hakodech se posa sur lui ».

Qui étaient ces hommes qui dansaient à cette occasions ?

Le Rambam ajoute : « n’y prenait pas une part active tout celui qui le désirait ainsi que les gens simples du peuple. Seuls les Sages d’Israel, les Grands de la génération ainsi que les personnalités importantes du Sanhédrin, les Rachei Yéchivot, les anciens et les gens de renom y participaient. Ce sont eux qui dansaient, jonglaient, jouaient de la musique et animaient ces réjouissances durant la fête de Souccot. Les hommes, les femmes et le peuple dans son ensemble en étaient les spectateurs et se contentaient de contempler ces prouesses et se délecter de leurs chants et louanges.

Rabbi Moché Chapira zstl s’interroge sur le principe de la simha qui incombe à chaque yéhoudi durant yom tov. Dans ce cas, comment comprendre que ces festivités au Beith Hamikdach ne soient réservés qu’à une élite ?

Il répond à travers une histoire qui viendra nous éclairer sur le sens des choses :

Il eut l’occasion de participer au mariage du fils unique de Rabbi Baroukh Bé’er ztsl. Ce mariage avait bien évidemment quelque chose d’exceptionnel. Il s’agissait du fils unique de Rabbi Baroukh Bé’er Cela suffisait pour constituer un événement en soi ! Tous les grands de la génération ainsi que les bnei yéchivot arrivèrent en multitude de tous les coins du monde pour se joindre à cette immense simha. On put assister à une fête extraordinaire ainsi qu’à des danses hors pair – c’était prodigieux et l’enthousiasme battait son plein !

Tout à coup, au cœur des danses et de la musique, plana le silence – chacun avait stoppé sa danse et l’orchestre s’était subitement interrompu… Que se passait-il donc ? Tout était soudainement suspendu, annulé…

Rabi Baroukh Bé’er s’approcha de Rabbi Elhanan Vasserman ztsl, le prit par la main et se mit à danser avec lui.

D’instinct, les invités présents et ceux qui se trouvaient sur la piste de danse s’écartèrent et ressentirent qu’ils n’avaient rien à voir avec cette scène de danse… ils pensèrent « qui suis-je pour danser aux côtés de ces Grands de la générations »… Tous s’arrêta et dans le silence, l’ensemble de l’assemblée stoppa pour contempler de ces deux Géants danser ensemble !

C’est ce même principe qui régnait au Beith Hamikdach : lorsque les Guédolim et les gens de renom dansaient, il convenait plutôt de se régaler des yeux et observer ce spectacle prodigieux et s’en réjouir plutôt que perdre cette opportunité unique et chercher à tout prix à danser.

Sim’hat Me’hilat ‘Avonot

Nous avons évoqué l’allure et l’aspect de la Simhat Beith Hachoéva, son déroulement ainsi que ses participants. Nous avons vu que tout celui qui voulait danser n’y dansait pas forcément et ainsi que nous l’apprend le Rambam : « les ignorants et tout celui qui y venait n’y participait pas tacitement. Seuls les Grands parmi les Sages d’Israel, les Rachei yéchivot, le Sanhédrin, les Hassidim, les Zékénim et les gens réputés, faisaient partie de ces rondes de danses, jouaient de la musique et animaient l’évènement au Beith Hamikdach durant les jours de Souccot. Par contre, le peuple, les hommes simples et les femmes venaient en tant que spectateurs, pour voir et entendre ».

שמחת בית השואבה : שמחת כל חלקי העם

En nous penchant sur les chants prononcés à cette occasion au Mikdach, il nous sera plus facile d’appréhender la véritable origine de cette simha en ces jours. La guémara Soucca (53a) rapporte les chants dont il s’agissait :

« Nos Maitres enseignent : les Hassidim et les Hommes de renom disaient « אשרי ילדותנו שלא בישה זקנותנו – bienheureuse est notre enfance qui n’est pas venue faire honte à notre vieillesse ». Les Baalei Téchouva disaient : »אשרי זקנותנו שכפרה את ילדותנו – bienheureuse notre vieillesse qui a expié notre jeunesse ». Les uns et les autres disaient : « אשרי מי שלא חטא ומי שחטא ישוב וימחל לו  – bienheureux est celui qui n’a pas fauté, quant à celui qui a fauté, qu’il fasse téchouva, il sera pardonné ! »

Nous retenons de ces paroles que les chants tournaient autour des fautes et de la Téchouva. C’était là, la grande simha post Yom Hakippourim, après avoir été pardonné pour les fautes commises. C’était la vraie raison de la simha !!

Nous comprenons que seul celui qui est conscient du sens pronfond de la simha en question peut s’associer à cette simha. Celui qui réalise pleinement ce qu’est la faute, en ressent encore davantage la grande joie que procure la כפרת עוונות- le pardon. Seules ces éminentes personnalités étaient à même de réaliser ce que représente réellement la faute et étaient aptes à se réjouir à la même mesure. C’est pourquoi le reste du peuple, plus inconscient devait se contenter d’assister et d’observer la manière dont ces Maîtres se  réjouissaient.

Le peuple ne parvient pas à ressentir la sévérité de la faute, la peur qu’elle doit générer. Par contre les Grands d’Israel parviennent à la concevoir et c’est la raison de leur réjouissance après avoir été pardonnés. Seul celui qui comprend vraiment ce que représente Roch Hachana et Yom Kippour peut danser à Souccot !!

Sim’hat Beit Hachoéva et Thora

Le midrach (Vaykra raba 30 ;12) rapporte que les quatre espèces utilisées pour la fête de Souccot expriment quatre types de personnes au sein du peuple juif. Une fois réunis, ils en expriment la parfaite harmonie du Peuple Juif.

Le Etrog, c’est Israel, il a en même temps bon goût et une bonne odeur- ainsi en va-t-il d’Israel – certains possèdent la Thora et également les bonnes actions.

Le Loulav représente Israel, réceptacle de dattes, il a bon goût, mais n’a pas d’odeur – de même, certains parmi les yéhoudim possèdent la Thora mais sont dépourvus de bonnes actions

La myrte, le Hadass, comme certains juifs a une odeur mais n’a pas de goût, ils ne détiennent pas la Thora mais comptent à leur mérite de bonnes actions,

La ‘Arava, les feuilles de saule, sont comme ces yéhoudim qui n’ont ni goût, ni odeur, ils n’ont ni Thora ni bonnes actions à leur répertoire !

Que va donc faire Hakadoch Baroukh Hou de ceux-là ? Les détruire ? Impossible !! Hakadoch Baroukh Hou dit : « qu’ils se lient l’un à l’autre et forment une seule entité. Lorsque vous agissez ainsi, Je m’élève ».

Si on y regarde de plus près : concernant le Etrog, le fruit lui-même est parfumé et est doté d’un bon goût. La feuille de Myrte elle-même est parfumée. Quant au Loulav , il n’est doté ni d’odeur ni de goût, ce sont ses fruits, les dattes qui recèlent un bon goût.

Comme nous l’apprend le midrach, la Thora est symbolisée par le goût du produit, quant aux bonnes actions elles sont représentées par l’odeur. Pour quelle raison l’odeur n’est-elle pas symbolisée par le Loulav même, mais par ses fruits ?!!

Le Loulav qui représente les Lomdei Thora. Il se doit d’être celui qui donne des fruits. Un Loulav qui ne donne pas de fruits n’est pas apte à la mitsva du Loulav !!

Pourquoi ??!!

La compensation des eaux d’en bas !

Au temps du Beith Hamikdach, chaque jour se produisait une pratique unique en son genre au cours de la fête de Souccot. On allait puiser de l’eau de la source du Chiloah pour la déverser sur le mizbéah. Cette pratique était source d’une immense joie. Elle était dénommée « simhat beith hachoéva » !! Dans le traité Souccah (51a), nos Sages rapportent que « celui qui n’a pas assisté aux réjouissances de Simhat Beit Hachoéva, n’a jamais vu de simha de sa vie ! »

ניסוך המים – ויקיפדיה

Quel est donc l’impact de cette joie prodigieuse ?!!

Qu’est-ce qui se cache derrière cet évènement tout particulier ? Quelle est l’explication de cette joie profonde et intense qui accompagne cet usage ??

La réponse à ces questions se trouve dans le midrach décrit au début de la parachat Béréchit.

Au deuxième jour de la Création du monde, Hakadoch Baroukh Hou sépara les eaux d’en eau de celles d’en bas. Il fut ordonné aux eaux d’en haut de rester au ciel, et à celles d’en bas, de descendre sur terre. C’est la raison pour laquelle, en ce deuxième jour, il n’est pas écris « כי טוב – que c’était bien ». Ce fut la première séparation occasionnée par la Création. Elle ne pouvait être qualifiée de « bonne ». Le midrach Béréchit raba 5 ;4 décrit que les eaux inférieures se séparèrent des eaux supérieures dans les larmes. Elles protestèrent et se lamentèrent en disant : nous désirons rester proches de Hakadoch Baroukh Hou, nous ne désirons pas descendre en un lieu d’impureté.

Hakadoch Baroukh Hou entendit leur plainte et les consola en leur disant : « sachez que dans trois mille ans, sera construit le Beith Hamikdach. Vos eaux seront utilisées pour être déversées sur le mizbéah durant la fête de Souccot. »

Malgré tout, les eaux d’en bas ne parvinrent pas à se contenter de cette promesse. Les libations d’eau se faisaient à partir de la source du Chiloah dont les eaux sont douces. Quel serait donc le dédommagement de toutes les eaux et des océans du monde entier qui sont salées ?? Hakadoch Baroukh Hou leur promit que les korbanot qui seraient offerts au Beit Hamikdach seraient salés grâce au sel dont l’origine est la mer – comme il est dit « על כל קרבנך תקריב מלך » (Vaykra 2 ;13)

Dès lors, il nous est possible d’expliquer la puissante joie qui régnait à Souccot, à  l’occasion de Simhat Beith Hachoéva. Elle était l’expression de l’enseignement qu’Israel tira de la mitsva des libations d’eau à Souccot :

En effet, si les eaux elles-mêmes pour obéir à leur Créateur, furent prêtes à descendre en un endroit d’impureté en contrepartie d’une compensation, trois mille ans plus tard, d’être déversées en offrande sur le mizbéah une semaine par an – alors pour l’homme qui vient dans ce monde, cet endroit d’impureté, oh combien de milliers de fois plus importante est sa compensation : il a la possibilité de s’adonner à l’étude de la Thora et s’affairer à l’accomplissement des mitsvot et pas uniquement le temps d’une semaine, mais durant toute l’année, chaque jour, chaque heure, chaque instant !!

C’est là, l’explication de l’intense joie d’Israel à l’occasion des festivités de Simhat Beith Hachoéva.

Quel mérite extraordinaire avons-nous, nous qui sommes les descendants de Avraham, Ytshak et Yaacov et qui avons reçu la Thora Hakédocha au Sinaï ! Chaque mot de Thora équivaut aux 613 mitsvot, chaque mitsva crée des mondes. Il est vrai que nos néchamot ont atterri dans un monde de bas niveau, mais chaque moment, chaque heure, nous pouvons nous élever et grandir grâce au Limoud Hathora, aux mitsvot, la Téfila , toutes ces choses qui se trouvent au point culminant du monde.

Un autre aspect que nous tirons de l’enseignement des eaux d’en bas, est leur capacité d’attendre 3000 ans pour permettre à Israel d’accomplir la mitsva du ניסוך המים – des libations d’eau !!

Combien est grand celui qui permet à son prochain d’accomplir une mitsva !! Sa récompense est inestimable tellement elle est valeureuse.